Quand les nouvelles technologies s'allient aux hommes dans la lutte anti-terrorisme
Les commémorations des attentats du 13 novembre 2015 sont une occasion de se poser une question et une seule: qu'avons-nous appris en un an sur le sujet terrorisme?
Je suis partie en quête de réponse durant la journée intitulée "les Rencontres des Acteurs publics" 2016 et ayant pour thème "Sécurité intérieure: hommes et technologies", qui ont eu lieu le 9 novembre dernier à l'École militaire à Paris, sous les auspices de l'INHEJS, c'est à dire l'Institut national des hautes études de la justice et de la sécurité. Pour plus d'infos, voir:
https://www.inhesj.fr/fr
https://www.inhesj.fr/fr
Ce jour-là coïncidait avec la proclamation du nom du quarante cinquième président des États-Unis, l'émotion était grande dans l'amphithéâtre Foch, bref, avec le thème de la journée et les commémorations du 13 novembre se profilant, l'ambiance était particulière.
En effet, l'élection présidentielle américaine a été une démonstration frappante de la faillite des TIC dans le domaine de l'analyse prédictive, quel beau terme n'est-ce pas, ça fait super branché, bref de l'incapacité de ces techniques pour prédire ce qui va se passer, même pour des évènements on ne peut plus couverts par tous les types de réseaux d'informations possibles et imaginables. Exit le Big Data, exit les analyses en tout genre. Bref ce fut un camouflet monstrueux.
En effet, l'élection présidentielle américaine a été une démonstration frappante de la faillite des TIC dans le domaine de l'analyse prédictive, quel beau terme n'est-ce pas, ça fait super branché, bref de l'incapacité de ces techniques pour prédire ce qui va se passer, même pour des évènements on ne peut plus couverts par tous les types de réseaux d'informations possibles et imaginables. Exit le Big Data, exit les analyses en tout genre. Bref ce fut un camouflet monstrueux.
Mais quand même!
*Est-ce que les nouvelles technologies, Big Data, biométrie, intelligence artificielle, associées aux qualités et compétences des différents corps chargés de la sécurité, ne devraient-elles pas nous éviter ces évènements funestes? Pourquoi ça ne nous protège pas, tout ce déploiement de forces et de techniques?
*Alors que le Big Data offre à l'humanité une somme jamais vue d'informations sur des millions de gens, comment expliquer l'impuissance de cette collecte monstrueuse de données dans la prévision des violences?
(NB: vous vous souvenez? Il y a un an et demi, j'avais écrit un article sur le Big Data, côté commercial.
Je vous le remets en lien:
refermons la parenthèse)
A- Constat
Les Acteurs publics ont commandé un sondage réalisé par l'IFOP et EY fondé sur la question: parmi les acteurs suivants, auquel faites-vous le plus confiance dans la lutte anti-terrorisme? en premier? Et en second?Sources: IFOP/Acteurs Publics |
B- Le cas de la Justice
Le mauvais chiffre de la Justice, 3%, m'interpelle en tant qu'auxiliaire judiciaire. En effet, la Justice est affligée de plusieurs maux:-mauvaise image: c'est une institution technocratique,
-coopération internationale souvent déficiente: au niveau européen, un processus de dislocation est en cours et les souverainetés nationales s'opposent souvent à la transmission d'informations sensibles.
-peines ineffectives suite au mécanisme de remise des peines: un condamné à 10 ans de prison n'en fera que 6 ou 7 en réalité.
-or, l'institution joue un rôle essentiel dans les problèmes rencontrés par les rescapés et les familles des victimes d'attentats. Il s'agit d'un contentieux de masse, les parties civiles sont extrêmement nombreuses, et, pour traiter tous ces dossiers, la Justice manque de moyens et de greffiers, principalement. Or, les procédures des parties civiles jouent un rôle important dans le processus de deuil.
bref, souvent, la Justice a mauvaise presse, alors que cette institution est au coeur de la lutte contre le terrorisme et les cyberattaques. Et pourtant, l'apport judiciaire est loin d'être négatif, il est souvent mal connu et mal perçu.
La centralisation des enquêtes et des jugements des actes terroristes est propre au système français. On trouve même plus de synergie entre la Justice et la DGSI, par rapport à ce qui se passe dans les pays anglo-saxons, par exemple.
L'arsenal législatif de notre pays n'a rien à envier à quiconque. En effet, quand on voit les mesures qui ont été prises par les USA dans la foulée du 11 septembre, mise au secret, tortures, Guantanamo, et autres Abou-Ghraib, ces mesures n'ont absolument pas produits les effets escomptés, tout en posant des problèmes de fond au régime démocratique du pays.
Selon le juge Jean-Louis Bruguière, le système judiciaire manque de réactivité. Ce manque s'ajoute à une coopération internationale difficile, car la France a souvent affaire à des pays qui ne sont pas touchés par ce terrorisme et donc qui n'ont pas besoin de lois sécuritaires.
Nos institutions affrontent des crimes complexes lors des attentats. Mais le fond reste toujours le même, technologies ou non: la criminalité s'associe à un bras armé, dans le seul but de nuire. Des organisations criminelles se mettent au service les unes des autres, et ce processus est favorisé par les facilités transfrontalières et transversales offertes par les nouvelles technologies.
C- Le retour au service militaire obligatoire et l'instauration d'une garde nationale plébiscités
75% des interrogés sont pour le retour au service militaire obligatoire.Objection Votre Honneur: étant donné qu'il a été vendu une grande partie des casernes, est-ce que ce plébiscite restera à l'état de voeu pieux?
Les effectifs de la Garde nationale se montent à 28 000 engagés pour un objectif fixé à 40 000 en 2018. Les 2/3 viennent de la société civile et l'âge moyen est de 37 ans.
Il existe d'autres "réserves" comme
-la Réserve opérationnelle: beaucoup d'anciens policiers la composent
-la Réserve citoyenne: cette réserve a acquis ses lettres de noblesse; un exemple? lors de l'accident de la German Wings, ce sont deux commandants de bord réservistes qui ont participé aux recherches et à l'analyse subséquente.
De plus on observe un très fort accroissement des candidatures aux fonctions policières, qui se sont montées à 35 000 cette année.
D- Et la sécurité privée?
Les chiffres la concernant sont faibles: peu de gens accordent leur confiance aux acteurs privés de la sécurité: 2% en premier et 5% au total.Pourtant, souvent, les premiers arrivés sur les lieux d'une attaque terroriste sont les vigiles privés à pied arrivant des structures avoisinantes qui les emploient.
L'émergence de la coopération entre forces de l'ordre et acteurs du secteur privé ne date pas d'hier. Un cadre juridique a été posé dès 1983 (loi), qui a été approfondi plus tard en 1995 (autre loi).
De même, le nombre de personnels privés est important: 150 000 (à comparer avec les 250 000 que comptent les forces de l'ordre).
Des organismes paritaires se sont mis en place comme:
-le COFIS: le comité de la filière industrielle de sécurité, voir lien ci-dessous:
http://www.gouvernement.fr/comite-de-la-filiere-industrielle-de-securite-cofis
-l'ANSSI: l'Agence Nationale pour la sécurité des systèmes d'informations, voir lien ci-dessous
http://www.ssi.gouv.fr/
La sécurité privée joue un rôle majeur dans la sécurisation des secteurs industriels sensibles et dans la protection des salariés en mobilité dans des pays ou régions dangereux. Les personnels privés impliqués dans ce secteur sont souvent d'anciens spécialistes issus de la police nationale ou de la gendarmerie, le cas de Jean-Louis Fiamenghi, ancien patron du RAID, chef de la sécurité chez Veolia, en est un exemple connu.
De ce fait la collaboration entre forces de l'ordre et acteurs privés a donné naissance à une logique de "coproduction" dans le domaine de la sécurité.
La sécurité informatique n'étant pas un moindre domaine.
Le 21 octobre dernier, une cyber-attaque généralisée s'est déroulée à travers les objets connectés.
Les entreprises françaises sont l'objet d'un véritable pillage informatique des données.
Le cyber-front existe réellement, et il ne s'agit plus de hackers isolés qui travaillent dans leur grenier. C'est une image totalement dépassée, même si elle est télégénique. Nous sommes en face de réseaux extrêmement bien équipés et collaboratifs au service d'organisations criminelles transnationales.
C'est le secteur de la santé qui est la cible privilégiée des attaques. Sur le Darknet, les données santé valent 100 fois plus cher que les données de cartes de crédit.
Pour l'instant, peut-on résister à une cyber-attaque? La réponse est non, car, la plupart du temps, les réseaux informatiques privés comme publics ont une mauvaise architecture. Nous subissons environ une vingtaine d'attaques graves par an.
Puis...
Un sondage a également été fait au sein des personnels de police et de gendarmerie concernant l'impact des nouvelles technologies sur leur travail.
Désolée, elle n'est pas super claire, je l'agrandis |
Prenons l'exemple des contrôles routiers, effectués par les gendarmes entre la France et la Belgique après le 13/11/15, il leur suffisait juste de taper le numéro d'immatriculation des voitures sur leur terminal embarqué pour, 5 mn après, avoir la réponse des fichiers des préfectures concernées, alors qu'il y a quelques années, il fallait tenir compte, pour avoir une information, des heures d'ouvertures des préfectures, de la bonne volonté des employés... bref ce qui prenait plusieurs jours se fait en quelques minutes.
De même, dans les cas de vidéosurveillance, les ordinateurs analysent les films, repèrent les anomalies et permettent aux personnels de se concentrer sur ces anomalies, au lieu de devoir passer en revue des heures et des heures de vidéos.
Cette transformation numérique du travail de sécurité est particulièrement avancée dans la gendarmerie.
Philippe Houillon, député-maire de Pontoise a eu une opinion nuancée sur l'engouement des citoyens à l'égard des forces de l'ordre et de la sécurité. En effet, selon la loi de 2007, "le maire est le coordonateur de la prévention de la délinquance dans sa commune". Mais les gens ont peur des représailles en cas de dénonciation d'infractions. Ce phénomène est très important et limite donc la participation des citoyens à leur propre sécurité. De plus, le maire n'a guère de moyens de répondre la mission que lui fixe la loi.
Pour Robert Herrmann, président de l'Eurométropole de Strasbourg et adjoint au maire, en charge de la sécurité et de la tranquillité publique, il n'y a pas encore assez de ressources à Strasbourg pour assurer ces missions. La ville elle-même dispose de 280 caméras de surveillance et de 500 caméras au total en comprenant les alentours et les autoroutes. La protection du réseau d'eau est une priorité, protection des captages et de la connaissance parfaite du réseau.
Alors, que conclure de tout ça? Le panorama est contrasté. La vidéosurveillance est peu contestée à présent, puisqu'elle a fait ses preuves, dans le cadre de la criminalité de base. Les administrations et entreprises, elles, ont besoin de spécialistes en TIC, il semblerait que le recrutement ne soit pas assez "moderne". Les ressources sont bonnes, mais pas assez nombreuses (constat général). Il faudrait intégrer les questions de cyber-sécurité dans de nombreux postes.
Pour la citoyenne que je suis, je ne venais pas pour m'entendre dire "le risque zéro n'existe pas", parce que je le sais déjà! Je ne veux pas non plus que "ma vie privée devienne une anomalie" et faire le point sur toutes ces questions m'a énormément intéressée. Vous pouvez visionner des débats de ces journées sur:
http://www.acteurspublics.com/articles/36
onglet sécurité
onglet 08/11/16: les Français favorables au service militaire obligatoire et à la garde nationale.
De même, dans les cas de vidéosurveillance, les ordinateurs analysent les films, repèrent les anomalies et permettent aux personnels de se concentrer sur ces anomalies, au lieu de devoir passer en revue des heures et des heures de vidéos.
Cette transformation numérique du travail de sécurité est particulièrement avancée dans la gendarmerie.
E- Cependant, il ne faudrait pas oublier le rôle des collectivités territoriales dans le domaine de la sécurité.
Dans ce domaine, il y a un souci: la France compte 34 000 communes, un chiffre supérieur à celui de la Chine et du restant l'Europe!Philippe Houillon, député-maire de Pontoise a eu une opinion nuancée sur l'engouement des citoyens à l'égard des forces de l'ordre et de la sécurité. En effet, selon la loi de 2007, "le maire est le coordonateur de la prévention de la délinquance dans sa commune". Mais les gens ont peur des représailles en cas de dénonciation d'infractions. Ce phénomène est très important et limite donc la participation des citoyens à leur propre sécurité. De plus, le maire n'a guère de moyens de répondre la mission que lui fixe la loi.
Pour Robert Herrmann, président de l'Eurométropole de Strasbourg et adjoint au maire, en charge de la sécurité et de la tranquillité publique, il n'y a pas encore assez de ressources à Strasbourg pour assurer ces missions. La ville elle-même dispose de 280 caméras de surveillance et de 500 caméras au total en comprenant les alentours et les autoroutes. La protection du réseau d'eau est une priorité, protection des captages et de la connaissance parfaite du réseau.
Alors, que conclure de tout ça? Le panorama est contrasté. La vidéosurveillance est peu contestée à présent, puisqu'elle a fait ses preuves, dans le cadre de la criminalité de base. Les administrations et entreprises, elles, ont besoin de spécialistes en TIC, il semblerait que le recrutement ne soit pas assez "moderne". Les ressources sont bonnes, mais pas assez nombreuses (constat général). Il faudrait intégrer les questions de cyber-sécurité dans de nombreux postes.
Pour la citoyenne que je suis, je ne venais pas pour m'entendre dire "le risque zéro n'existe pas", parce que je le sais déjà! Je ne veux pas non plus que "ma vie privée devienne une anomalie" et faire le point sur toutes ces questions m'a énormément intéressée. Vous pouvez visionner des débats de ces journées sur:
http://www.acteurspublics.com/articles/36
onglet sécurité
onglet 08/11/16: les Français favorables au service militaire obligatoire et à la garde nationale.